Les mots à la mode. Il y en a toujours eu, et dans tous les milieux. En ce moment dans le monde de l’entreprise, sachez briller en plaçant « pivoter », « appétence » ou « disruptif ». Plutôt engagé politiquement ? Pensez à caser « bifurcation » ou… « résilience » !
Et voilà ! Après durable et transition, c’est en effet au tour de la résilience de devenir le suspect numéro un. Comme les deux autres, d’autant plus suspect que présenté comme concept positif face aux bouleversements de tous ordres que nous vivons actuellement. Avec la vague verte des dernières municipales, la résilience avait ouvert moults délégations aux quatre coins de la France : « urbanisme résilient », « résilience alimentaire »…
Le terme avait déjà été élu buzzword de l’année par le magazine Times en 2013. Neuf ans plus tard, impossible de ne pas trouver a minima une occurrence chaque jour dans la presse, sur les ondes, sur les réseaux… Et bing ! Notre président qui nous décrète le mois dernier un grand Plan de résilience économique et sociale. Guerre oblige. On sent bien que le terme s’émousse et s’use. Qu’il agace et crispe. D’ici là que Maud Fontenoy nous sorte un nouvel opus « Ras le bol des résilients ! ». Alors quoi, définitivement plus d’appétence pour la résilience ?
Suite à la tempête Alex, j’avais posté sur mon blog L’Anthroposcène un article qui évoquait la résilience dans sa relation au durable. Ce blog devient aujourd’hui un média avec le soutien de La Strada. Dans l’édition aussi, il est possible de croiser des tuteurs de résilience… Vous retrouverez sur le site lanthroposcene.fr le texte qui explique plus avant ce nouveau départ. Vous y retrouverez également chaque mois les versions longues de certains des sujets publiés ici, avec l’édition print de La Strada, ainsi que d’autres articles venant prolonger le dossier du mois. Lequel interroge la résilience donc pour ce numéro de lancement.
Nous avons notamment rencontré Emmanuel Delannoy et donné carte blanche à Christine Marsan. Ils ne semblent pas enclin(e)s à jeter le concept aussi facilement. Parce que la résilience n’est pas la réaction. Parce que la nature n’a que faire de nos modes et de nos irritations. Parce que dans deux ans nous fêterons les 200 ans de la découverte de l’effet de Serre par Joseph Fourier. Parce que plus de 40 ans après son fameux rapport sur Les limites de la croissance, Dennis Meadows nous disait, toujours en 2013, qu’il est trop tard désormais pour le développement durable : « il faut se préparer dès maintenant à construire dans l’urgence de petits systèmes résilients. » (Politiques de l’Anthropocène, Les Presses de Sciences Po). Merci infiniment à Michel Sajn de nous accueillir aussi généreusement en son média. Une forme répandue de coopération que l’on peut qualifier de symbiose il me semble.